L'ancienne candidate à la présidentielle colombienne et ex-otage des
Farc durant six ans, Ingrid Betancourt, sera reçue ce soir sur le
plateau de News & compagnie, présentée par Nathalie Levy.
Elle y évoquera l'engagement qu'elle mène depuis cinq ans pour la
défense des femmes iraniennes et l'importance de lutter pour l'égalité
des sexes.
Vous serez ce soir sur le plateau de Nathalie Levy après le 28 minutes
d'Élisabeth Quin sur Arte. Privilégier des émissions d'actualité
présentées par des femmes, est-ce un choix délibéré de votre part?Non,
ce n'est pas moi qui ai fait ce choix. Ce sont elles qui m'invitent.
D'où l'importance qu'il y ait de plus en plus de femmes dans les médias
pour mettre le «spot light» sur un sujet tel que la défense des
Iraniennes, sur lequel nous avons eu beaucoup de mal à attirer
l'attention. Pendant longtemps, je dirais qu'il y a eu une forme
d'indifférence. Non seulement pour les Iraniennes mais pour l'Iran.
Pourquoi cet engagement de votre part envers les Iraniennes en particulier?
Se
battre en France pour les femmes iraniennes, c'est mettre en lumière le
chemin qu'il nous reste à faire. Il y a à peine cinquante ans, l'Iran -
comme l'Égypte - était un pays qui se modernisait, où les femmes
étaient libres. Aujourd'hui, la violence envers elles y est
institutionnalisée. Dans le cas iranien, c'est l'extrémisme qui m'a
horrifié. La discrimination est inscrite dans la Constitution et mise en
pratique par le gouvernement. La source n'est en aucune façon la
religion musulmane mais une interprétation déformée de l'islam et du
Coran dont s'inspire Daech. Après Charlie et les attentas de novembre, il est de notre devoir de nous attaquer au coeur du mal.
L'élection d'une femme à la tête de l'État est interdite par la Constitution iranienne.
Le
guide suprême ne peut être une femme. Une vice-présidente pour le droit
des femmes a été nommée. Un prétexte dans ce pays où elles n'ont aucun
droit.
Selon les chiffres de l'ONU, il y a 10 femmes sur 152 chefs
d'État. Vous avez vous-même brigué un mandat présidentiel. Avez-vous été
confrontée à des comportements déplacés? J'ai été élevée en
France, je n'ai jamais senti de discrimination. En Colombie, j'ai
travaillé au ministère des Finances et au Commerce extérieur, sans aucun
problème particulier. Mais en arrivant au Congrès, là j'ai compris.
Tout le pays était représenté, même les régions les plus reculées. Être
une femme dans le monde politique continue de provoquer des dérapages
machistes. Regardez ce que vient de vivre Myriam El Khomri. Si elle
avait été un homme, cela n'aurait pas dérapé.
Vous revendiquez-vous féministe?
Je n'aime pas ce terme.
Il ne faisait pas partie de ma génération. On pensait ne plus en avoir
besoin. J'ai changé. Nous perdons partout du terrain. Quand je suis
sortie de la jungle en 2008, ce fut un de mes grands chocs. En Occident,
on a tendance à tourner en dérision le combat des femmes, considéré
comme un combat de seconde classe par rapport à la lutte contre le
racisme. Alors qu'il ne faut jamais oublier que s'attaquer aux femmes, à
leur fragilité physique, c'est la porte d'entrée de toutes les
horreurs.
Le 8 mars, c'est important?
Célébrer le jour de la femme
reste l'occasion de réfléchir à cette conquête emblématique de
l'Occident. La plus belle que nous puissions exporter. Dans les
Évangiles, la relation de Jésus avec les femmes est révolutionnaire. Et,
à une période où le témoignage féminin ne comptait pas, la résurrection
du Christ racontée par les femmes constitue la première étape de
l'égalité entre les sexes. Cela me passionne. Même si, du côté des
religions, il y a encore beaucoup à faire.
Propos recueillis par Isabelle Spaak
http://tvmag.lefigaro.fr/programme-tv/article/television/91597/ingrid-betancourt-le-combat-des-femmes-perd-du-terrain-.html
No comments:
Post a Comment